mercredi 23 novembre 2011

Traditions artistiques

Festivals
Vous l'imaginez bien, le Bhoutan conserve une signature culturelle extraordinaire. D'inspirations religieuses boudhistes , les divers festivals offrent des danses  colorées, parfois endiablées et parfaitement orchestrées. J'ai, heureusement, pu assister à l'un d'eux le festival de la grue tibétaine dans la vallée de Phobjikha.


 Les populations locales envahissent ce Dzong (Gangtey Gompa), s'assoient par terre sur des tapis de plastique, souvent avec un petit lunch, et  assistent avec attention à  une douzaine de danses diverses dont certaines absolument "exotiques" avec ces masques légendaires. Ce n'est pas une performance pour touriste mais bien une fête locale qui reste une belle occasion pour partager les dernières nouvelles.






À la fin de la journée, les familles retournent dans leur village dans des petites charrettes alors que la température chute rapidement.



Les arts


Il existe treize formes d'arts traditionnels et d'artisanat toutes inspirées de l'histoire du boudhisme entre autres la maçonnerie, la sculpture, la peinture, le travail de bronze et de bambou et la tapisserie. Cet étudiant de l'école des arts de Thimphu s'applique sur sa pièce et n'a pas été distrait par ma présence !



La tapisserie est la forme artistique la plus sophistiquée. Certaines pièces sont d'une grande finesse et vendu à fort prix.  Jusqu'au milieu du vingtième siècle certaines taxes étaient payées par ces tissus et livrées au dzong local.



dimanche 20 novembre 2011

Sujets variés




Le "doma"


J'ai pris un certain temps avant de m'habituer  à avoir une conversation avec un  interlocuteur qui avait un "doma" dans la bouche. Il s'agit d' une noix d'arec  enveloppée dans une feuille de bétel sur laquelle on ajoute une petite quantité de carbonate de calcium . Le tout  agirait comme un léger  stimulant qu'on pourrait  comparer  au café .
 Il est amusant de voir les gens s'offrir un doma prêt- à servir , une dose dans un petit sac en plastique.  Cette intéraction amicale  fait penser au partage de cigarettes, un petit moment d'échange privilégié...







Mauvais pour la santé ? On parle d'augmentation de cancers oraux- pharyngés ce qu'un spécialiste bhoutanais (ORL) dit ne pas avoir observer.
On s'interroge sur le lien possible avec le cancer de l'estomac.  J'ai toujours cru que cette forte incidence  observée dans le monde asiatique, était reliée à la consommation d'aliments fumés . Mais cela ne fait pas partie des  habitudes alimentaires des Bhoutanais.





Effet secondaire majeure :  dents et gencives rouges qui ne gênent personne ! La très grande majorité des gens âgés  ont le sourire "coloré".  Les jeunes s'y adonneraient moins quoique mes collègues à l'urgence semble y avoir recours plusieurs fois dans la journée.







































Bébé panda roux


Notre guide, Phub Tshering garde-chasse de son métier,  a sauvé in extremis un bébé panda roux qui était en vente dans un village au sud du Bhoutam. Il avait été séparé de sa mère par des trafiquants.  Les premières semaines, sa femme lui a donné le biberon . ll est intéressant  de savoir que les Bhoutanais respectent leur nature, conservent leurs forêts mais ils voient d'un très mauvais oeil que l'on  garde chez eux un animal sauvage. Ça porte malheur !
















Après quelques semaines  de "maternage"ils ont dû le confier à l'état. Nous lui avons rendu visite à notre grand plaisir. Il jouait comme un chaton. La suite ? Eventuellement, il y aura essai de réintégration  en milieu naturel. Sinon il sera confié à un Zoo à l'étranger car il n'y a pas de Zoo au Bhoutan.




Les phallus






Peu de sociétés exposent ainsi des phallus  peints sur le mur de leur maison.  C'est le "divine madman" le lama Drukpa Kunley originaire du Tibet qui , au 16 sème siècle,  a laissé sa trace . Il avait un comportement  "outrageant"  voire obscène pour éveiller ses disciples jugeant trop sévères  les conventions de l'époque  qui empêchaient d'apprendre le réel enseignement de bhouda. Ses exploits sont légendaires  et il est un des saints favoris des Bhoutanais.

Aujourd'hui des couples désirant des enfants ou ayant peine à en avoir visitent le temple de la fertilité qui lui ai dédié. On pendra des mobiles en forme de phallus aux quatre coins d'une nouvelle construction pour  pour protéger ses résidents des mauvais esprits. Peindre un pénis sur le mur de sa maison , c'est attirer la chance .


Le fromage de yak

Le yak est totalement domestiqué. On en possède une ou deux bêtes et parfois deux cents.  On en mange la viande, séchée sur une corde au soleil ou en saucisse et on produit un fromage fort particulier. Vendu  en blocs , il est consommé par petits quartiers  très dures qu'on laisse  de côté dans sa joue  (oui encore)  pour laisser la salive le soin d'en révéler le goût.


Le bon usage de la marijuana



Je vous ai déjà présenté le cochon-qui-sourit. J'en ai trouvé la raison ! On lui sert  des plants de marijuana, qui poussent comme la mauvaise herbe,  pour augmenter son appétit ! La consommation  humaine, par contre, est strictement interdite.  Le gouvernement  a d'ailleurs une peur bleue que des touristes introduisent cette habitude au Bhoutan .  C'est d'ailleurs pour cette raison qu'une taxe quotidienne élevée soit exigée du voyageur, éliminant les "back-packers"...

Pas d'adresse civique au Bhoutan

Un jour dans un village près de Punakha, nous avons rendu visite à une dame âgée et j'ai pris des clichés de quelques membres de sa famille. Quand j'ai voulu connaître l'adresse pour leur envoyer les photos, c'est la jeune étudiante qui a écrit le nom de son école et sa classe car il n'y a pas d'adresse civique au Bhoutan ...Récemment, le gouvernement a annoncé le début prochain d'assignation d'adresses.



mardi 15 novembre 2011

Les enfants

Mercredi  15 novembre 2011

Le jeu 
Les premières photographies d'enfants, je les ai prises  la première journée de mon séjour. J'ai croqué ces deux garçons qui avaient tout un plaisir à jouer avec des armes-jouets. Ca leur vient tout naturellement ou  inspiré par des émissions de télé ( il n'y avait ni internet ni télévision jusqu'en 1999) .











À l'école

 Le Bhoutan est reconnu pour offrir  à ses habitants l'éducation et les soins de santé gratuits, jusqu'à  certaines limites bien sûr.  L'échec aux examens en dixième et en douzième années  signifient la fin de gratuité et la recherche d'écoles privées à la charge des parents. Les meilleurs iront éventuellement en Inde,  au Sri Lanka ou même en Australie pour poursuivre des études supérieures à la charge de l'état .


L'enseignement se fait en anglais.  Durant mes marches exploratoires dans les rues de Thimphu, il est fréquent qu'on m'aborde pour une petite jasette.


Cet enseignement séculaire a remplacé les écoles bhoudistes qui ont longtemps été les seules "institutions" disponibles pour les enfants. Aujourd'hui encore, certaines familles choisissent de placer leur  garçon dans des écoles monastiques  espérant qu'il deviendra éventuellement un moine d'une certaine importance. On m'a dit néanmoins, qu'un choix libre à l'adolescence était davantage encouragé.




Lors d'une visite dans un de ces monastères, un jeune d'environ 5 ans ne possédait plus  l'attention nécessaire  pour apprendre par coeur des textes de prières. Son aîné assis à ses côtés  avait une patience d'ange et a réussi à garder sa concentration.

Rassurons-nous ils ont aussi l'occasion de jouer, ici à une version  de baseball où j'ai bien failli participer  !


À l'extérieur des villes les enfants doivent souvent marcher deux à trois heures pour rejoindre l'école. On les voit sur le bord de la route avec  costume d'écolier (gho et kira) leur boite à lunch à la main.  À tout coup de joyeuses salutations. Ici deux jeunes plus curieux que les autres qui se sont retournés au bon moment.





Je crois que le Bhoutan reste le paradis pour le photographe amateur et professionnel. Non seulement les Bhoutanais nous accueillent chaleureusement mais les portraits que ce soit d'enfant ou adulte nous procurent des moments presqu'exaltants !








lundi 14 novembre 2011

Travail à l'urgence





Seulement six jeunes médecins Bhoutanais prennent les tours de garde à l'urgence. Ils ont tous reçus leur formation de base en Inde ou au Sri Lanka mais  sans avoir fait de résidence, cette période d'apprentissage clinique très  importante. À leur retour, ils sont plaçés en région ou à l'urgence de l'hôpital de Thimphu. Ils espèrent un jour (certains attendent depuis plus de 6 ans) recevoir une bourse pour poursuivre une spécialité y compris en médecine d'urgence. Ils ont une énorme charge de travail surtout après 15 heures quand les cliniques externes ferment ( il n'y pas de clinique privée au pays).

Mes débuts

Je dois avouer que j'étais plutôt angoissée le premier jour de travail. Je ne connais pas la "compétence" de chacun (infirmières et médecins) par contre je sais que je peux leur transmettre  des connaissances lors de l'évaluation des patients qui se présentent. Le premier se plaint d'essoufflement, fièvre et toux. Signes vitaux sont pris. OK c'est un bon départ . Sa saturation à l'air libre est de  90 % et l'infirmier ne lui donne pas d'oxygène. Oups ! Voyant mon air interrogateur l'infirmier  me dit:  nous sommes en haute altitude et la saturation est normale à 90-92 %. Pour m'en convaincre je prends la mienne : 91 % !

Alors ces deux premières semaines, je me suis mise sur le mode écoute et apprend !  Fièvre et douleur abdominale : penser à la typhoïde.  Fièvre et maux de tête :  typhus (ou  malaria ou fièvre dengue s'ils ont voyagé ou reste dans le sud du pays) . 
Autre réalité :  quand vous avez un mal de gorge (surtout enfants et adolescents ) nous recherchons la présence de streptocoques du  groupe B, de vilaines bactéries  responsables, entre autres, de la fièvre rhumatismale qui  abîme les valves cardiaques .  Au Bhoutan, les soins de santé n'ont débuté qu'à la fin des années 1960 et  la majorité des paysans étaient isolés dans leur campagne sans accès facile  à une clinique voire même aux antibio. Plusieurs adultes sont donc aujourd'hui affligés de graves problèmes  cardiaques. 

La tuberculose
Il y a deux ans, j'ai eu la chance de prendre un cours en médecine tropicale à Vellore en Inde. J'ai appris que 40 % de la population  ont été en contact avec le bacille responsable de la tuberculose et peuvent, dans leur vie, en souffrir les conséquences. Statistiques probablement semblables  ici avec  des présentations tristement variées: maladie de Pot alors que les microbes se sont développés dans une vertèbre, tuberculomes  dans la cavité abdominale ou dans des ganglions  et évidemment la forme pulmonaire .

De jeunes adultes se présentent régulièrement à l'urgence avec une histoire de plusieurs  semaines de toux,  de fièvre nocturne et d'essoufflement. Regardez bien la photo ci-bas. J'ai réussi à capter le médecin , qui se prépare à ponctionner le poumon de ce patient pour en retirer un liquide inflammatoire, et ce  à travers la radiographie. On remarque que   le poumon droit est complètement blanc, oblitéré par cette effusion pleurale.

On laisse partir le jeune, les résultats seront prêts demain. J'imagine facilement le nombre de personnes qu'il a pu contaminer. Mes collègues me confirment des souches multi-résistantes liées soit à une pauvre observance aux médicaments ou à contamination de souche provenant de l'Inde.

Les infirmières
Les infirmières sont très réceptives  à l'enseignement. J'ai organisé des ateliers pratiques le lundi ce qui a permis d'établir une bonne relation de confiance.  Elles ont, entre autres, la responsabilité de suturer les lacérations . Ici la médecin de garde est intervenue pour réparer une mauvaise plaie à la tête. Au Bhoutan, ce sont les Indiens  et les Pakistanais qui travaillent sur les chantiers de construction dans de très pauvres conditions de travail et de sécurité  et ce sont eux que l'on reçoit en grande majorité pour des blessures diverses. 


 Lors de mes différents voyages dans des pays en développement, j'ai souvent remarqué que la confiance est fragile  envers  la médecine "moderne". Une opération qui a mal tournée, des médicaments en rupture de stock, des effets secondaires inattendus, une mauvaise écoute sur l'interprétation de la maladie , une grande méfiance sur les interventions même pour une intraveineuse  sont tous des éléments qui peuvent y contribuer.
La médecine traditionnelle, elle, vit depuis la nuit des temps sans interruption et reste l'approche la plus populaire. On consulte d'abord les praticiens  à l'Hôpital de "Traditional Medecine" ou alors le lama.  Avec ses bons et ses mauvais côtés selon le praticien qui peut tarder à référer des patients moribonds.  Par exemple, une  jeune patiente qui souffrait de pierres dans la vésicule biliaire  arborait des cicatrices ligniformes dans le dos et sur la figure  témoins d'une consultation auprès d'un soignant traditionnel.  Elle  conserve toujours ses pierres et les malaises qu'elles provoquent . Autre exemple, les enfants qui ont un retard de language doivent éviter les oeufs,le poulet, le boeuf, des sources de protéines qui seraient plutôt salutaires. J'aimerais bien comprendre l'origine de telles recommandations. 

Néanmoins l'Hôpital de Thimphu est plein à craquer. Ils offrent le service de diverses spécialités  et reste l'hôpital de référence pour les hôpitaux de régions. Les services de pédiatrie et de gyneco-obstétrique fonctionne rondement.




Des unités de santé primaire un peu partout dans le pays offrent les services d'un infirmier qui peut  évaluer certaines conditions légères et référer au besoin à l'hôpital local.

Je dois néanmoins vous dire que j'étais totalement atterrée par le manque de médicaments essentiels à l'urgence et par le manque de tests de laboratoire de base à cause du manque d'agents réactifs. Non pas par pauvreté mais par ratés administratives. Les patients sont évidemment les premiers à en souffrir et  les jeunes médecins ne peuvent contempler des diagnostics différentiels puisque les investigations et traitements ne sont pas disponibles ce qui limitent beaucoup l'apprentissage. 



Terminons avec cette image prise lors d'une ballade en fin de journée dans les collines de Thimphu, j'y ajouterai mes prières, devinez ce qu'elles contiennent ...











mercredi 9 novembre 2011

Le monde rural

Jusqu'en 1960, il n'y avait au Bhoutan aucune route, aucun hôpital ou école hormis quelques initiatives des missionnaires. Cinquante ans plus tard, grâce à l'aide économique de l'Inde, le Bhoutan a parcouru des pas de géants. Néanmoins, les bhoutanais sont dépendants de leur terre pour survivre.  Ils cultivent, à petite échelle, une terre qui donnera, selon  la région, du riz, des pommes de terre, du choux, des choux-fleurs, des haricots et surtout des piments . Des piments, qu'on fait sécher sur les toits de tôles et qui seront de tous les repas .



On peut posséder deux- trois vaches à qui on donnera  un nom et qu'on (la femme) traie tôt le matin pour  le lait, le beurre et le fromage. Un fromage servi en sauce avec...le piment. 


Des vaches qui n'ont pas de grands pâturages à leur disposition et qu'on retrouvera souvent  le long de la route. C'est sans doute pour cette raison  que cette jeune femme  a dû donner un coup d'épaule suite à  un accouchement spontané de sa vache !



Aussi quelques  poules pour les oeufs et un beau gros porc gourmand qui, lui, n'aura pas de nom puisqu'il décèdera un jour  de causes "naturelles"...
  
Malheureusement, cette diète est insuffisante si on ne réussit pas à la varier en achetant, échangeant des produits alimentaires différents d'une région à l'autre. L'accès à ces marchés  serait un facteur important à cette pauvreté alimentaire . Le système routier n'est pas complété (rappelons le terrain très accidenté du Bhoutan) Certains villages sont  facilement à deux à trois jours de marche . Conséquences: une anémie  ferriprive ( par manque de fer)  très répandue ce, à tout âge et   non compensée par l'altitude (pour mes amis MD..) et  une  malnutrition chronique (calories et protéines insuffisantes) affectant 35 % des enfants âgés de 5 ans et moins (amélioration tout de même sur  un 40% il y a 5 ans).
Il existe, par contre, quelques programmes "nutritionnels" à travers le Bhoutan dont la distribution  d'un comprimé de fer  par semaine, le jeudi, pour les fillettes.

Ce dernier week-end, un trek de 9 heures dans une tempête de neige à 4,200 mètres d'altitude (alors que nous avions espéré admirer de  hauts sommets enneigés...) s'est terminé dans la vallée de Ha où j'avais planifié dormir chez l'habitant . 

Notre guide Phub Tshering, un garde forestier d'expérience,  nous a avoué avoir eu une petite peur. Il avait fort apprécié  son GPS qui nous a permis de retrouver notre chemin et descendre à des altitudes protégées du vent, nous sauvant d'une hypothermie galopante assurée ! 

Ah ce froid que nous connaissons  si peu chez nous, trouvant un refuge facile dans nos maisons au système de chauffage performant. La maison bhoutanaise de briques et de bois garnies de grandes fenêtres  n'est pas d'équerre face au froid mordant d'hiver. Quand on  a les sous au pris de $12 on peut s'acheter de chaufrettes de 1000w.




Chez notre hôte, une truie (petit poêle à bois) dans une seule pièce procurait une chaleur pour un périmètre bien limité. L'hiver arrive tôt cette année et la température chute sous- zéro ce qui inquiète les fermiers. Il reste encore quelques récoltes de navets, de choux et de salades à effectuer. 


J'ai naîvement cru que les chiens, qui  brisent de façon incessante le silence nocturne à Thimphu, seraient différents à la campagne. Non ils ont le même rôle, la même responsabilité que leurs collègue urbains. Ils sentent les mauvais esprits, les démons et les éloignent de nous par leurs jappements. Ah comme j'en suis heureuse ...(aucun bouchon ne leur résiste !)


Je termine cette deuxième entrée de mon blog avec le sourire généreux de cette  dame qui représente bien cet accueil unique des Bhoutanais pour l'étrangère que je suis.